Le but en or ou la mort subite (1994-2004).
Je suis nostalgique de ce but en or. Je n’ai jamais eu la chance d’être dans le stade au moment du but en or… mais cela devait être extrêmement jouissif de voir votre équipe l’emporter de cette manière.
Pour départager les équipes lors de la prolongation une solution fut envisagée temporairement par la FIFA entre 1994 et 2004, que nous pouvons donc considérer comme une véritable expérimentation. En juillet 1994, le Board a proposé d’arrêter le match au cours de la prolongation après le premier but marqué. Contrairement à l’histoire du football, le match se termine au moment où un but est marqué… émotions garanties pour les deux équipes ! Ainsi le vainqueur est désigné par une action de jeu et non sur un tirage au sort ou la loterie des tirs au but. Cette modalité semble donc acceptable pour les joueurs et pour le public. Le premier nom donné à cette règle, ‘la mort subite’ a fait débat. Image forte… oui perdre ainsi est sans doute considéré comme une mort symbolique ; les perdants s’écroulent aux quatre coins du terrain. Le sport offre, alors, le spectacle de « la mort jouée » selon la formule deBernard Jeu (1972). Pour lui,
L’essentiel, néanmoins, réside dans le tragique. Le sport, c’est l’image de la mort affrontée par le vaincu.
Pour la première fois, la finale du Championnat d’Europe des nations de 1996 s’est jouée avec ‘la mort subite’. L’issue est favorable aux Allemands qui battent la République Tchèque, deux buts à un au cours des prolongations, au bout d’un match de 95 minutes.et du but en or de d’Oliver Bierhoff.
Un glissement sémantique s’opère avant le mondial de 1998, « la mort subite », mots trop durs à connotation médicale et déplacés par rapport aux véritables victimes, se transforme en « but en or ». Le but de Laurent Blanc à la 113ème minute contre le Paraguay en huitième de finale fut le premier but en or de l’histoire de la Coupe du monde. Durant cette période de 10 ans, sept matchs se sont terminés par un but en or, en Coupe du monde et en Championnat d’Europe, dont trois inscrits par des Français. D’abord celui de Laurent Blanc à la 113e en 1998, puis celui de Zinedine Zidane à la 117e lors de la demi-finale de l’Euro 2000 (France – Portugal : 2-1), enfin celui reprise de volée inoubliable de David Trezeguet à la 103e lors de la finale du même Euro 2000 (France – Italie : 2-1) !
Ce but en or est à comparer au « but vainqueur » dans tous ces petits matchs sur les terrains vagues, dans les cours d’école, ou lors des jeux d’entraînement. Vers la fin de partie, d’un commun accord, les joueurs décrètent que le prochain but, sera le but gagnant ! Une pratique « sauvage », utilisée parfois en compétition. Par exemple, en mars 1895, lors du Championnat de France (élimination directe), l’arbitre avait décidé d’arrêter la partie au premier but marqué pendant la prolongation qui s’était engagée alors que la nuit était tombée. Le but de Neuilly a provoqué la réclamation des Asniérois !
En 2003, le « but en or » se transforma en « but en argent ». Le premier but marqué dans les prolongations n’arrêtait pas subitement le match, qui se poursuivait jusqu’à la fin de la première prolongation de 15 minutes. Si à ce moment une équipe menait au score alors le match se finissait, au bout de 105 minutes. Dans le cas contraire, une nouvelle prolongation de 15 minutes était jouée. Ce règlement fut appliqué par l’Union des Associations Européennes de Football (UEFA) à partir de 2003 et notamment pour l’Euro 2004 au Portugal. Sans doute trop cruelle pour l’équipe perdante, la règle de ‘la mort subite’, est enterrée par le Board le 27 février 2004 avec la suppression du ‘but en or’ et du ‘but en argent’. Le « but en or » adopté par les lois du jeu entre 1994 et 2002, a fait basculer, pendant 8 ans, au cours des prolongations, le football vers un jeu qui combine le score et la durée limite. Un temps de jeu aléatoire, compris entre 90 et 120 minutes.
Les raisons de cet abandon ne sont pas explicitées par le Board. Il est possible de penser que cette innovation ou expérimentation était paradoxale pour ce sport qui se joue depuis 1863 selon une durée prévue à l’avance.
Mais l’émotion ressentie, à l’époque, pour ces trois buts de l’équipe de France devant mon poste de télévision reste incomparable ! Pour le but de Laurent Blanc, j’étais seul dans mon canapé, avec les places du quart de finale au Stade de France dans ma poche… L’Italie était déjà qualifiée et si la France se fait éliminer… je me retrouve à voir Italie -Paraguay à la place de France-Italie ! Une joie intense dans mon salon !
Pour le But de David Trezeguet, je suis dans le Club-house de Quincy-Voisins, je viens de signer mon contrat d’entraineur avec le président du club Patrick Aznar et nous regardons le match avec mes futurs joueurs. Une explosion de joie collective indescriptible… les Italiens étaient passés si près de la victoire à la fin du temps réglementaire ! (But de Sylvain Wiltord à la 94e minute).