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L'histoire du but en or / VAR & Vidéo Asssitance  / VAR… dans une zone grise

VAR… dans une zone grise

Au cours du choc entre les deux Olympiques Marseille et Lyon (1-0, 14e journée de Ligue 1 disputé le 6 novembre 2022), de nombreux observateurs se demandaient si intervenant pour déposséder Alexis Sánchez du ballon juste devant les buts lyonnais, Nicolas Tagliafico avait fait faute sur l’attaquant de l’O.M. à la 13e minute ?

« On voit bien qu’il veut avant tout tacler le ballon. Toute la question est de savoir s’il touche le joueur en intervenant. Le problème, c’est qu’on n’est pas dans une situation tranchée, toute blanche ou toute noire. On est dans une zone grise. Les avis pourront diverger en fonction des angles de vue des caméras. La décision relève de l’appréciation de l’arbitre, que certains comprendront, d’autres pas. Moi, elle ne me heurte pas. »

Bruno Derrien, 6 novembre 2022

Dans son commentaire, l’ancien arbitre international Bruno Derrien (L’équipe lundi 7 novembre 2022) ne donne pas de réponse… peut-être bien que oui, peut-être bien que non !

Ce n’est pas choquant qu’il n’y est pas de réponse… Mais paradoxalement, les dirigeants de la FIFA affirment qu’avec la VAR, 99% des décisions arbitrales sont bonnes !

La Zone grise

La « zone grise » illustre les cas où le VAR ne sait pas si la décision de l’arbitre de champ est erronée ou non. En effet, la décision initiale de l’arbitre ne peut être modifiée que si la vidéo indique une erreur claire et évidente ; autrement dit, selon la définition de l’IFAB : d’une part si toute personne neutre affirmerait qu’il y a une erreur (y compris les spectateurs), et d’autre part si l’arbitre lui-même avait changé sa décision en revoyant la situation. En fait, la question que doit se poser le VAR n’est donc pas : « L’arbitre a-t-il pris la bonne décision ? », mais « La décision de l’arbitre est-elle clairement erronée ? ». En cas de doute, on rentre dans la « zone grise » et c’est alors la décision initiale de l’arbitre qui prévaut. Il reste donc, en partie, le maître du jeu.

Nous étions revenus en 2021, dans « VAR, le Miroir aux alouettes » sur le bilan les deux années l’expérimentation de la VAR (2016-2018), pour questionner cette zone crise et ce chiffres rocambolesques de 99% de bonne décisions arbitrales.

Diminuer le nombre d’erreurs manifestes représentait l’objectif affiché pour justifier l’introduction de la VAR. La recherche d’une plus grande équité sportive justifiait le délaissement d’une solution uniquement humaine et le choix d’une solution technologique comme aide à l’arbitrage. Pour cautionner cet arbitrage vidéo, il suffisait donc de laisser parler les chiffres et de comparer le football d’aujourd’hui au football d’une époque révolue sans la VAR.

Cette expérimentation d’une grandeur inégalée dans l’histoire du football a concerné plus de 1000 matchs en deux ans, sur trois continents. Début janvier 2018, l’IFAB avait déjà tiré un bilan très positif et encourageant des tests qui se déroulaient depuis 2016 dans une vingtaine de fédérations, notamment 306 matchs supervisés dans le championnat d’Allemagne et 380 en Serie A italienne.

« On a fait des tests sur plus de mille matchs. Sans VAR, il y a une erreur tous les 3 matchs ; avec la VAR, on tombe à une erreur tous les 19 matchs

L’Équipe du 5 juin 2018) Gianni Infantino le président de la FIFA

Le bilan de la Fédération affirmait que la vidéo avait permis de faire passer les bonnes décisions arbitrales de 93 à 99 % ! Une statistique fort étrange et invérifiable qui supportait difficilement l’analyse des faits et des chiffres disponibles.

Dans un premier temps il était possible de revenir sur le bilan réalisé par la FIFA à la fin de la phase de tests. L’expérimentation pharaonique avait porté sur 972 matchs officiels, 934 en championnat et 38 en Coupe, entre mars 2016 à février 2018.

Lors de ces 972 matchs, la FIFA avait répertorié 315 situations en zone grise. Pour cet ensemble de cas, la décision initiale de l’arbitre avait finalement prévalu. En lisant entre les lignes, dans un match sur trois la décision arbitrale était tellement soumise à interprétation qu’il était impossible de se mettre d’accord, et l’arbitre restait le maître des lieux et du jeu. Si son erreur n’était pas manifeste, c’était du 50/50 et donc, statistiquement, sur 100 arbitres beaucoup auraient pu prendre la décision inverse. Cette zone grise limitait l’aide technologique et entretenait la dimension humaine de l’arbitrage. Elle questionnait surtout la statistique avancée par la FIFA de 99 % de bonnes décisions !

Dans un match sur trois, il était toujours possible de polémiquer sur la décision arbitrale qui pouvait tout changer… Pour ces situations en zone grise, la VAR avait soit réalisé un « contrôle silencieux », soit interpellé l’arbitre. Dans ce cas, l’action avait été pointé du doigt, scrutée à la loupe, disséquée. Le flottement arbitral se manifestait par un arrêt du jeu plus ou moins long car le « contrôle oreillette » prenait du temps. Le doute s’immisçait dans l’esprit des spectateurs et se dissipait difficilement pour les acteurs et les supporters du camp lésé.

Au-delà de ces 315 situations en zone grise, 307 décisions erronées avaient été corrigées par la VAR, soit environ une tous les trois matchs. À la lecture de ces résultats, il était possible de conclure que La VAR avait donc été sollicitée 622 fois en 972 matchs, donc en moyenne moins d’une fois par match.

Pour la FIFA, in fine, 9 % seulement de ces corrections avaient eu un impact direct sur le résultat final. Une statistique qui paraissait très étrange. En effet, dans le détail, près de 70 % des interventions de la VAR concernaient les penaltys (42,3 %) et les buts validés (26,4 %). Ces décisions modifiaient toujours le score du match, et bien souvent le résultat final dans un sport où le nombre de point marqués était faible.

Cet optimisme de la FIFA tranche nettement avec les polémiques récurrentes depuis 6 ans lors de chaque journée de championnat ou compétition.

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